« La vie est un mouvement. Réhabiliter un mouvement plein de sens, c’est favoriser la connexion à la vie. »
Rolando Toro
Qu’est-ce que la Biodanza ?
Depuis quelques années, la Biodanza fait doucement sa place dans le paysage québécois des approches alternatives : des cours dans plusieurs villes, des facilitateurs et une école de formation professionnelle.
Cours de danse ? Éducation somatique ? Danse thérapie ? Croissance personnelle ? Qu’est-ce au juste que la Biodanza ?
Unique en son genre, bien qu’ayant plusieurs des qualités de ces disciplines, la Biodanza pourrait plutôt être qualifiée d’approche de développement humain. C’est une forme de pédagogie de « l’être au monde », une éducation à l’art de vivre pleinement, intensément, à chaque instant, une invitation à la pleine présence.
Contrairement aux approches dites thérapeutiques, la Biodanza ne s’attarde pas aux déséquilibres ou dysfonctions de l’individu. C’est plutôt en stimulant la partie saine, lumineuse de l’être, en favorisant le développement de nouveaux potentiels et en nourrissant la pulsion de vie propre à tout être vivant qu’elle provoque une transformation merveilleuse dans la réalité de ceux et celles qui la pratiquent.
Créée dans le terreau fertile des années soixante, nourrie par les grands mouvements de changement sociaux tels l’antipsychiatrie, le tropicalisme, la lutte pour les droits et libertés en Amérique du sud, « mai 1968 » etc., la Biodanza est née d’un désir d’humaniser ce monde dans lequel nous vivons.
Philosophie et science
« La danse est un mouvement profond qui surgit de ce qu’il y a de plus viscéral chez l’être humain. Elle est le mouvement de la vie, rythme biologique, rythme cardiaque, mouvement respiratoire. Elle est l’élan qui pousse les êtres humains à se lier entre eux. Elle est aussi mouvement vers soi, mouvement d’intimité. »
Rolando Toro
La Biodanza puise ses fondements dans la vie elle-même. Elle nous invite à renouer notre relation affective sacrée à la vie non pas en cultivant dogme et ésotérisme, mais en retrouvant un lien concret au phénomène vivant.
Elle puise donc ses fondements théoriques et méthodologiques dans deux grandes sources :
• Le principe biocentrique : Il s’agit d’un principe philosophique dont
le postulat de base est que la vie a préséance sur tout. La vie n’est
pas le résultat d’un processus chimique ayant eu lieu dans l’univers,
mais bien l’impulsion première ayant donné naissance à l’univers et
à toutes ses manifestations. Ma vie n’est donc pas mon projet ; je
suis un des multiples projets de la vie. Alors, je n’ai pas à me changer
ou à vouloir être quelqu’un d’autre. Je n’ai qu’à réaliser au maximum
tous mes potentiels, être à chaque jour un peu plus moi-même, me
développer dans toute l’étendue de mes possibilités. À chaque instant.
prendre soin de la vie en moi, autour de moi, la nourrir, la protéger,
la faire fleurir.
• La science moderne : La méthodologie de la Biodanza, la façon dont
sont construites les séances et les séquences musicales, est basée
sur une compréhension profonde du fonctionnement biochimique
de l’organisme humain. Neuroscience, physique quantique,
physiologie, biologie et sémantique musicale figurent donc parmi
ses fondements importants.
Le pouvoir de la vivencia
Avant toute chose, la Biodanza propose de faire l’expérience de la vie,
de doucement plonger dans le présent pour retrouver « l’émouvante sensation de la splendeur de vivre », c’est-à-dire cultiver l’art de la vivencia : l’instant vécu intensément, ici et maintenant.
Elle nous propose d’entrer dans des états précognitifs, antérieurs à la parole et à la culture, de retrouver ces espaces de perméabilité et de réceptivité où tout devient possible et de laisser la vie nous enchanter. Cet état de disponibilité et d’ouverture, de sensibilité et de pleine présence que l’on nomme la vivencia, est très proche de celui de la toute petite enfance, période pendant laquelle s’est structurée notre personnalité.
Plutôt que de lutter contre nos blocages et dysfonctions, nous pouvons, grâce à la vivencia, laisser la vie, l’autre, le groupe, l’environnement, éveiller des potentiels endormis, inhibés, inconnus… La vivencia nous permet de redevenir enfin des êtres entiers, intègres et intégrés.
Les jeux, les danses, les rythmes, les moments de folie, la beauté
des mélodies, le calme, la douceur, la tendresse, la chaleur humaine facilitent le chemin et nous permettent de gentiment perdre la tête
et de nous laisser être, simplement, un peu plus nous-mêmes.
Bref, il n’est jamais trop tard pour avoir une enfance heureuse !
Le groupe, un contenant affectif structurant
La Biodanza est essentiellement une discipline de groupe. Il n’y a pas
de Biodanza individuelle. Retrouver notre humanité, c’est retrouver notre capacité à vivre heureux et libre parmi et avec les autres. Et, puisque l’identité ne peut se construire que dans l’altérité, dans la rencontre
avec l’autre et le monde, le groupe offre une richesse extraordinaire de stimuli, un miroir accueillant favorisant l’émergence et le fleurissement de chacun et chacune.
Le groupe de Biodanza est sécuritaire, permissif, affectif et sans jugement. C’est un terrain de jeux, un laboratoire aimant où explorer de nouvelles possibilités, où progressivement sortir des codes sociaux pour oser se montrer et apprendre à tisser les liens qui nous unissent en conjuguant nos libertés.
Un peu d’histoire
La Biodanza fut créée par Rolando Toro, psychologue, anthropologue, poète et peintre, alors qu’il travaillait au Centre d’études d’anthropologie médicale de l’école de Médecine de l’université de Santiago du Chili.
Née d’une merveilleuse intuition et des constats faits à partir d’expérimentations entre amis, elle s’est développée à la suite de ses travaux sur la danse et la musique avec des patients de l’hôpital psychiatrique de ladite université.
En 1970, on lui demande de créer à l’université une chaire de Biodanza, alors dénommée Psychodanza. En 1984, la Biodanza fait son apparition en Europe. Elle est présentement enseignée et pratiquée dans plus de 26 pays et compte une centaine d’écoles à travers le monde.
Elle est enseignée au Québec de 1986 à 1999, sur l’initiative de Jean-Yves Bourdages, psychologue. C’est grâce à Michel Loignon, amoureux de la Biodanza, et à trois facilitateurs européens, Hélène Lévy Benseft, Isabelle Dettwiler Lorétan et Olivier Dettwiler, que l’École de Biodanza de Montréal (offrant la formation de trois ans pour devenir facilitateur de Biodanza) voit le jour à l’automne 2003.
Rolando Toro, le père de la Biodanza, s’est éteint le 16 février 2010 à l’âge de 85 ans ; il dansait toujours deux semaines avant sa mort.
En conclusion
Joyeuse et ludique, la Biodanza, discipline non verbale et non analytique, propose de laisser la parole céder sa place, de permettre à l’espace de s’ouvrir au silence, à l’émotion, à de nouvelles formes de communication. Elle nous invite à sentir avant de réfléchir, à écouter les messages profonds de notre être et à les utiliser comme moteur de nos actions et de nos choix.
Progressivement, marcher hors des pudeurs apprises et accepter de vivre chaque instant avec sa pleine charge de sensations, de ressentis, de sentiments. Honorer la dimension sacrée de la vie en retrouvant le plaisir du mouvement naturel et laisser ce plaisir recréer les chemins qui mènent vers notre liberté, vers notre capacité à être nous-mêmes, avec l’autre, avec et en ce monde. Consentir, unir notre sensibilité à cette force de vie et dire oui ! S’offrir la pleine permission de vivre de tout son cœur et de tout son corps, non plus à corps perdu mais bien à corps retrouvé. Danser et conjuguer nos libertés pour multiplier tous nos possibles à être et laisser naître au plus profond de nous la douce ivresse de la vie qui se déploie… Voilà l’essence de la proposition !
Au plaisir de danser avec vous !